Jinrou-Scantrad
Embrasse-moi, menteur
Présenté par : Jinrou-Scantrad
Traduction : Alcancia
Correction : Angie
Chapitre 11
La salle de réunion était silencieuse. Personne n’osait prononcer un mot. Ils se contentèrent tous de passer en revue la pièce. Je m’assis, le dos bien droit, et comme les autres cadres, j’attendis que Keith commence à parler.
— Hahh…
Keith soupira longuement. Ce n’était pas bon signe.
— Vous avez tous lu l’article dans le dernier numéro de Forbes ?
Nous nous regardâmes tous, surpris par cette question soudaine. Keith posa son rapport et tapa la table de son doigt en rythme.
— Vous pourrez y trouver le montant de mes richesses. Bien sûr, j’en possède sûrement plus que ce qui y est écrit.
Il ne nous fallut pas longtemps pour comprendre pourquoi il se vantait de son argent. Keith sourit froidement.
— Vous pensiez vraiment que vous pouviez causer ma faillite avec un tel projet ? Si c’était votre objectif, vous auriez dû le rendre encore plus pathétique. J’ai dépensé plus d’argent en achetant mon yacht qu’en faisant ce film. Ou alors, vous prévoyez des centaines de suites à cette merde ? Vous allez passer vos vies entières sur ce film ; comme c’est fantastique.
Keith ajouta même un « waouh » émerveillé à la fin de sa rude moquerie, en applaudissant avec force. Personne ne put le contredire. Le silence s’installa parmi les cadres, qui subissaient l’atmosphère, la tête basse. Keith perdit son sourire et grinça des dents.
— Vous avez perdu un an pour faire ce truc ? Des centaines de conneries de ce genre sortent chaque jour. De la merde ne deviendra pas une œuvre d’art parce que vous y mettez de l’argent. De la merde, ça reste de la merde. C’est juste que celle-là est plus chère. Si c’est ennuyant, ça devrait au moins être artistique. Si ça ne l’est pas, alors ça doit au minimum plaire au public. Qu’est-ce que je suis censé attendre de ça ?
Il jeta le rapport à la poubelle et fronça les sourcils.
— Aucun œil artistique, aucun cerveau apte à réfléchir. Si au lieu d’un paquet de nouilles, vous avez vraiment un cerveau, alors utilisez-le !
Malgré ses insultes, aucune voix désapprobatrice ne s’éleva. Pendant un instant, je décidai de vider mon esprit et je laissai ses mots passer d’une oreille à l’autre. Après tout, Dieu avait donné deux oreilles aux hommes ; l’une pour écouter et l’autre pour que les sons s’en déversent. Comme s’il n’en pouvait plus, Keith rabattit, d’une main brutale, ses cheveux en arrière. Pourtant, ils ne tombaient même pas.
— Abandonnez ce projet et apportez-m’en un nouveau. Repartez de zéro. Trois jours devraient être suffisants. J’apprécierais que vous ne me fassiez plus jamais perdre un temps précieux pour ce genre de conneries.
Keith sortit sans hésiter, après cette conclusion. Je le suivis dans l’instant.
Tandis qu’il marchait, il prit une cigarette et la plaça entre ses lèvres. Il ne s’arrêta pas, même quand il l’alluma avec aisance et expira sa première bouffée. Bien évidemment, il ne se retourna pas non plus pour me regarder.
— Appelle Whitaker.
— Pour ? répondis-je immédiatement.
Tout en continuant sa route, le regard fixé droit devant lui, il ordonna :
— Augmenter le nombre de personnes pour ce week-end.
— Compris. L’équipe de sécurité pour la croisière, c’est bien ça ? Souhaitez-vous ajouter autre chose ?
Il ne m’avait même pas parlé de cette fête. Quand je demandais subtilement plus d’informations, il se tourna vers moi pour la première fois, bien que tout ce qu’il fit fut de me jeter un rapide coup d’œil sans pour autant s’arrêter.
— C’est ton travail de faire en sorte que tout se passe bien.
— Compris, répétai-je sans rien ajouter d’autre.
Il délaissait souvent ce genre de détails pour les soirées normales. Je devais principalement me préoccuper de la liste des invités, mais je savais que Keith me la fournirait. Je préférais ce genre d’évènements, car cela allégeait la pression sur mes épaules.
Il reporta son attention devant lui. Pendant une brève seconde, je crus le voir sourire. J’y réfléchissais quand Keith parla.
— J’aime ta capacité à t’adapter à la situation.
— Merci.
J’étais sincère. Je ne m’attendais pas à ce que cet homme exigeant m’approuve. Alors que j’étais encore confus de ce compliment soudain, il poursuivit.
— C’est vraiment pratique.
Il se parlait plus à lui-même qu’autre chose, mais cela rendit sa remarque bien plus sincère. Pour cet homme, j’étais juste un secrétaire bien pratique, ni plus, ni moins. Cela n’aurait pas dû me surprendre, mais je tressaillis. Je dissimulai mes émotions et souris, comme d’habitude.
— Vraiment ? Je suis soulagé.
En m’assurant que ma voix ne tremble pas, j’ajoutai :
— Je continuerai à faire de mon mieux.
Il se tourna vers moi. Cette fois, il souriait vraiment.
— Tu ne causes jamais de problèmes et tu es toujours assidu dans ton travail. Comment fais-tu ? Est-ce que tu te transformes la nuit et pars à la chasse au mâle, ou quelque chose du genre ?
Il devait être réellement curieux. En tant qu’Alpha Dominant qui ne passait pas un jour sans avoir de relations sexuelles, ce n’était pas étonnant qu’il le soit. Mais il avait tort. Lui et moi étions deux opposés, telles les deux extrémités d’un aimant.
— Non. Puis, pourquoi présumez-vous que je suis à la recherche d’un partenaire masculin ?
Ma question le rendit confus.
— Tu es un oméga. Les femmes alphas sont rares, donc l’option la plus facile pour toi, c’est les hommes, sauf si tu te fiches qu’ils soient des bêtas.
J’en fus déconcerté un moment. Je ne savais pas comment le corriger. J’avais l’habitude d’avoir des petites amies avant ma transition, mais depuis que j’étais tombé amoureux de Keith, je n’avais plus entamé d’autres relations. D'ailleurs, depuis que j’étais devenu un oméga, je n’étais plus certain de mon orientation sexuelle ; et donc de si j’aimais les hommes ou les femmes.
Cependant, une chose était sûre, cet homme arrogant en face de moi s’arrangeait toujours pour faire battre la chamade à mon cœur, même maintenant.